L’Italie sous toutes ses formes
Le second volet du travail à Rome est tout personnel : les pensionnaires sont en effet libres d’effectuer des relevés hors de toute commande académique et de se constituer ainsi un portefeuille de dessins originaux, très utiles pour la suite de leur carrière à une époque où la circulation des livres de modèles architecturaux est réduite.
Donnant libre cours à sa passion, Charles copie des basiliques paléochrétiennes, des églises médiévales, des palais de la Renaissance et de l’âge baroque, des maisons de campagne de grandes familles romaines avec leurs jardins, voire des habitations urbaines ou rustiques toutes simples. Il entre dans les musées, de création récente, pour y copier les objets d’art et s’intéresse aux fouilles archéologique. Il veut tout voir, tout copier, y compris dans des lieux ordinairement inaccessibles aux artistes : n’étonne-t-il pas ses camarades en s’habillant en pénitent afin de participer à des processions religieuses qui lui permettent d’entrer dans des églises interdites au public ! Comme d’autres artistes français, il voyage à l’intérieur de l’Italie, allant jusqu’à Naples en 1790 avec l’architecte Jacques-Charles Bonnard, et réalise en chemin de nombreux croquis.
La curiosité débridée du jeune architecte est certes un trait de son caractère, mais elle est aussi la marque d’une époque. Depuis le milieu du XVIIIe siècle, l’architecture a vu s’opérer une rupture dans l’unité du goût qui était au fondement du style classique. Désormais se développe une gamme élargie de sensibilités ainsi qu’un intérêt pour les périodes grecque et médiévale et pour des formes pittoresques, rustiques ou exotiques. Cet éclectisme naissant, qui cohabite sans conflit avec le goût de l’antique propre au néo-classicisme, connaîtra son grand essor au XIXe siècle.
Avec Pierre Fontaine, Charles Percier relève des édifices de la Rome « moderne », celle de leur temps, avec un souci d’exhaustivité qui est nouveau. Ils en tireront, à partir de 1798, des recueils de modèles gravés qui influenceront l’architecture privée en France, diffusant dans le pays le goût italien.
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